Modèle anatomique de poumons. Robina Weermeijer / Unsplash
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Cancer du poumon : quand l’hérédité s’en mêle

Si le tabagisme reste le principal facteur de risque du cancer du poumon, il en existe d’autres. Certains sont d’origine professionnelle comme l’amiante, d’autres ont des racines environnementales, telles que la pollution de l’air ou le radon, un gaz ubiquitaire naturellement présent dans l’atmosphère provenant de la désintégration d’éléments radioactifs dans le sol.

Mais il existe aussi des facteurs de risque génétiques, des variations présentes dans nos gènes depuis la naissance qui, pour certaines, augmentent de manière importante le risque de cancer du poumon. Ces mutations sont appelées « variants pathogènes ». On parle alors de prédisposition génétique au cancer du poumon.

Ces « cancers génétiques » apparaissent plus précocement – avant 50 ans – que les cancers du poumon classiques – vers 65 ans –, souvent chez des non-fumeurs. Les identifier est essentiel pour le patient, car sa prise en charge médico-chirurgicale peut s’en trouver optimisée. Mais ça l’est aussi et surtout pour sa famille, les variants pathogènes étant héréditaires. Ils peuvent, en effet, être transmis à la descendance et ont, la plupart du temps, été hérités de l’un des deux parents.

Deux gènes en cause

On sait depuis les années 1960 que le fait d’avoir un proche parent ayant eu un cancer du poumon augmente le risque d’en développer un soi-même, indépendamment d’un éventuel tabagisme. Plus récemment, les études portant sur des paires de jumeaux ont prouvé l’importance des facteurs génétiques.

Le risque de développer un cancer du poumon pour le « vrai » jumeau (monozygote, autrement dit issu de la même cellule-œuf) d’un patient ayant déclaré un cancer du poumon est, en effet, supérieur à celui encouru par un « faux » jumeau (dizygote, deux cellules-œufs différentes). Si les jumeaux monozygotes possèdent le même patrimoine génétique, les jumeaux dizygotes n’en partagent environ que la moitié. En présence d’une exposition carcinogène similaire (tabac, pollution, amiante, radon…), l’augmentation du risque observée chez les premiers atteste ainsi de la part du risque attribuable à nos gènes.

On connaît aujourd’hui deux gènes majeurs de prédisposition au cancer du poumon : TP53 (Tumor protein P53) et EGFR (Epidermal Growth Factor Receptor). Tous deux sont impliqués dans les adénocarcinomes pulmonaires, le cancer du poumon le plus fréquent, mais vraisemblablement pas dans ses autres types, les cancers étant classés en fonction de leurs caractéristiques microscopiques.

Les variants pathogènes de TP53 sont responsables d’une maladie génétique rare : le syndrome de Li-Fraumeni. Chez ceux qui en sont atteints, le risque de développer de nombreux types de cancer augmente, souvent à un âge jeune. Les plus fréquemment rencontrés sont le cancer du sein, les tumeurs des os et des tissus mous (sarcomes), les tumeurs cérébrales, les leucémies et certains cancers des glandes surrénales (glandes produisant les hormones du stress).

Mais ce n’est que récemment que l’augmentation du risque de cancer du poumon a été mise en évidence de manière convaincante. Au début des années 2010, près de 300 personnes touchées par un syndrome de Li-Fraumeni, mais indemnes de cancer ont été suivies par imagerie par résonance magnétique (IRM). Lors du premier examen, un cancer du poumon a été diagnostiqué chez 9 d’entre elles.

Le rôle du gène EGFR, le second gène majeur de prédisposition au cancer du poumon, a d’abord été découvert chez des non-fumeurs présentant un adénocarcinome pulmonaire. Chez ces patients, un variant pathogène était retrouvé dans les cellules cancéreuses, mais pas dans les cellules « normales », le cancer acquérant ces variants d’EGFR à mesure de son évolution et de l’exposition aux traitements.

Cette découverte a littéralement transformé le traitement du cancer du poumon en permettant le développement de thérapies ciblant spécifiquement le gène dans la cellule cancéreuse. Chez de rares patients, cependant le variant pathogène est également retrouvé dans les cellules normales, ce qui conduit alors à un syndrome de prédisposition génétique. Contrai au syndrome de Li-Fraumeni, les patients ne présentent qu’un risque de développer un cancer du poumon.

Aussi fréquent que le cancer du sein en France

À la lumière de l’intérêt croissant porté au sujet et des progrès dans les capacités d’analyse génétique, les connaissances sur les prédispositions génétiques au cancer du poumon sont amenées à progresser considérablement dans les années à venir avec l’identification de nouveaux gènes. Des données récentes suggèrent notamment que le gène ATM pourrait aussi être associé au cancer pulmonaire. Ce gène de prédisposition au cancer du sein et du pancréas est, par ailleurs, responsable d’une maladie neurodégénérative chez l’enfant : l’ataxie télangiectasie.

Une prédisposition génétique au cancer du poumon n’est identifiée que dans une faible proportion de patients atteints par la maladie (dans 1 à 2 % des adénocarcinomes, par exemple). En nombre absolu, un variant pathogène serait néanmoins retrouvé chez plusieurs centaines de nouveaux patients par an en France, si les recherches étaient systématiquement lancées pour étudier les cas suspects. En y ajoutant les autres porteurs dans la famille, on arrive à environ 1 000 personnes nouvellement concernées chaque année.

On peut noter que la proportion d’adénocarcinomes pulmonaires d’origine génétique est assez proche de celle observée dans le cancer du sein, pourtant le monde médical et les non-spécialistes sont bien plus familiers avec cette seconde maladie.

L’identification d’une prédisposition génétique est bénéfique tout d’abord pour le patient traité et dans un second temps, pour sa famille. En effet, le traitement du malade peut être optimisé, par exemple par l’évitement d’une radiothérapie, dont la toxicité est accrue en cas de syndrome de Li-Fraumeni, ou par l’administration de thérapies ciblées de dernière génération, en cas de variant pathogène d’EGFR. L’identification de porteurs sains parmi les proches du patient permet d’envisager un dépistage du cancer du poumon, avec par exemple la réalisation d’IRM thoraciques à intervalles réguliers ainsi que des recommandations strictes de ne pas fumer.

Le diagnostic de cancer du poumon chez une personne jeune et souvent non fumeuse est un véritable cataclysme. Face à une maladie que l’on associe naturellement au tabac et à l’âge, un sentiment d’incompréhension prédomine. L’évocation d’une cause génétique apporte un début d’explication et une déculpabilisation par rapport à une responsabilité personnelle dans la survenue de la maladie. Une prédisposition génétique, quand elle est identifiée, permet d’agir puisqu’il est alors possible de mieux traiter le patient et de protéger ses proches.


Patrick Benusiglio, Maître de Conférence Universitaire et Praticien Hospitalier à AP-HP .Sorbonne Université, spécialiste des prédispositions génétiques au cancer, Sorbonne Université et Jacques Cadranel, Sorbonne Université

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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