L'œuvre “Miraikan” au National Museum of Emerging Science and Innovation
  • The Conversation

Décrypter notre génome grâce à l’intelligence artificielle

Toutes les cellules de notre corps contiennent la même séquence d’ADN, le même génome. Et pourtant il existe une grande variété de types cellulaires, par exemple les fibres musculaires, les cellules de la peau, du sang ou encore les neurones

Dans chacun de ces types cellulaires, certains gènes sont exprimés, c’est-à-dire que la séquence d’ADN correspondante est transformée en ARN puis en protéines, alors que d’autres sont éteints. Les instructions qui garantissent une expression coordonnée de ces gènes au cours du développement, puis dans chaque tissu de chaque organe, sont elles-mêmes inscrites dans le génome.

Seuls 2 % de notre séquence d’ADN code pour des protéines et c’est dans les 98 % restant du génome que l’on cherche actuellement à comprendre le programme de coordination de l’expression des gènes.

C’est donc dans un livre de 3 milliards de lettres (imaginez un roman d’un million de pages !) qu’il faut décrypter les règles de ce programme.

C’est là que l’intelligence artificielle va jouer un rôle important. Mais avant de comprendre comment, il nous faut résumer ce que nous savons sur la façon dont est mis en œuvre ce programme.

Des coffres verrouillés

Les premières réponses obtenues montrent que c’est la manière dont se replie la molécule d’ADN au sein des chromosomes qui définit le programme de régulation des gènes. Une image simplifiée de ce repliement serait celle d’une chambre forte dans une banque.

Chaque coffre contient un gène, et la séquence de ce gène est utilisée pour fabriquer une protéine seulement si ce coffre est ouvert. Chaque coffre est verrouillé par une serrure à combinaison et seules quelques combinaisons sont capables de l’ouvrir.

Dans cette image, chaque cellule est une réplique de la chambre forte, une combinaison est un ensemble de facteurs de transcription, et pour chaque gène – chaque coffre – existe une combinaison unique, spécifique à la cellule. Cette combinaison correspond à l’ensemble des facteurs de transcription présents dans la cellule. Ces facteurs de transcription activent ou inhibent les gènes en se liant sur la molécule d’ADN à des endroits précis.

Ainsi, à une combinaison de facteurs de transcription donnée correspond un ensemble de coffres déverrouillés et un ensemble de gènes exprimés. Dans les différentes régions d’un embryon en train de se développer, ces facteurs peuvent être présents ou absents, et la réaction de notre génome à leur présence ou à leur absence permet l’apparition de tissus spécialisés aux endroits voulus.

À gauche, un domaine génique contenant un gène, trois amplificateurs et flanqué de deux isolants. Trois facteurs de transcription, représentés par une carrée, un rond, et un triangle, vont, lorsqu’ils sont présents dans la cellule en nombre suffisant, se lier à un amplificateur du gène pour permettre son expression. À droite, chaque domaine génique peut être comparé a un coffre-fort. Dans cette image, les isolants correspondent aux parois du coffre, les amplificateurs aux mécanismes de serrure. Le coffre s’ouvre si et seulement si les bons facteurs de transcription sont présents dans les proportions requises. Jean-François Dejouannet - MNHN / UMS 2AD / AIS, Author provided

La séquence de notre génome contient ainsi le plan qui permet de construire non seulement l’ensemble des coffres, mais aussi l’ensemble des systèmes de verrouillage de ces coffres. Ce plan fait intervenir deux types d’éléments, qui correspondent chacun à de petites séquences de quelques dizaines de lettres (A, C, T ou G). Tout d’abord les « isolants » permettent partitionner le génome, c’est-à-dire de définir là où commence et où finit chaque coffre. Ensuite les « amplificateurs » permettent de fabriquer le système de verrouillage qui valide ou invalide l’ouverture de chaque coffre. Pour avoir une idée de la taille et de la complexité de ce système, il faut imaginer que notre génome contient environ 30 000 gènes, un nombre similaire d’isolants, et des dizaines voire des centaines d’amplificateurs pour chaque gène.

Des expériences pour mieux comprendre

Pour mieux comprendre l’activité de tous ces composants au cours du développement, des expériences de grande ampleur sont réalisées aujourd’hui. Ces expériences reposent sur notre capacité à lire, ou séquencer, la succession des lettres du génome.

Les techniques de séquençage, qui était au paravent seulement utilisable sur des ensembles de millions de cellules, peuvent maintenant être appliquées aux cellules uniques.

Ces développements font entrevoir pour la première fois la possibilité de révéler simultanément l’ensemble des éléments régulateurs (isolants et amplificateurs) ainsi que leur activité dans les différentes cellules au cours du temps.

Bien que les recherches dans ce domaine avancent à grands pas grâce aux nouvelles technologies, une question reste en suspens : comment déterminer l’effet d’une variation du génome sur le processus de régulation des gènes ?

Cette question est d’une importance cruciale pour comprendre pourquoi certaines maladies ont une prédisposition génétique et ainsi comment mieux soigner un individu lorsque l’on connaît son patrimoine génétique.

On observe en effet couramment que certaines variations récurrentes du génome peuvent avoir un rôle dans l’apparition ou l’aggravation de maladies. La grande majorité de ces variations apparaît dans des régions du génome qui ne sont pas des gènes, mais des régions isolantes ou amplificatrices.

Un algorithme pour analyser les séquences d’ADN

Pour comprendre l’effet de ces variations du génome, il est maintenant possible de recourir à l’intelligence artificielle. L’idée est simple : utiliser toutes les données expérimentales obtenues jusqu’ici pour entraîner un algorithme à prédire l’activité des régions isolantes et amplificatrices en fonction de leur séquence génomique.

Pour cela, il faut tout d’abord convertir les quatre lettres A, C, T et G en langage binaire de 0 et de 1. Puis on entraîne des réseaux de neurones similaires à ceux qu’utilisent les algorithmes de reconnaissance d’images, utilisés par exemple pour numériser des documents manuscrits ou pour analyser les images des caméras embarquées de véhicules autonomes.

Toutes ces applications sont basées sur le même principe : convertir un ensemble de chiffres, appelé entrée, en un autre ensemble de chiffres, appelé sortie. Cette conversion s’obtient en plusieurs étapes. Un ensemble de pré-sorties sont calculées par la multiplication de chaque chiffre de l’entrée par un coefficient puis par l’addition des résultats obtenus. Ce processus est répété en changeant les coefficients pour générer des centaines ou des milliers de pré-sorties qui vont constituer une couche du réseau. L’ensemble des pré-sorties de cette première couche sert d’entrée à une deuxième couche. Plusieurs couches sont ainsi empilées jusqu’à la dernière, qui donne la sortie du réseau. Le processus d’entraînement consiste à fixer les valeurs des coefficients qui font correspondre chacune des entrées à la sortie correspondante. Pour tester ces valeurs et les optimiser, il faut ainsi faire des milliards d’opérations, toutes très simples. Cela est aujourd’hui possible grâce aux performances des cartes graphiques modernes développées initialement pour les jeux vidéo.

Un réseau de neurones est entraîné pour associer à une séquence d’ADN sa fonction d’isolant ou d’amplificateur, ainsi que la combinaison correspondant à son activation s’il s’agit d’un amplificateur. Le réseau peut ensuite être utilisé pour scanner le génome en entier et prédire les règles de régulation des gènes d’un individu. Jean-François Dejouannet - MNHN / UMS 2AD / AIS, Author provided

Dans notre cas, l’entrée va être une suite de 0 et de 1 qui correspond à une séquence d’ADN binarisée. La sortie va correspondre à une autre suite de 0 et de 1 qui va représenter une annotation fonctionnelle (par exemple 10 ou 01 pour « amplificateur » ou « isolant » et 00001000 ou 01000000 vont correspondre à différentes combinaisons de facteurs de transcription). Une fois l’algorithme entraîné, il devient alors possible de l’utiliser pour prédire l’annotation fonctionnelle d’une séquence dont on aurait changé une ou plusieurs lettres : les fameuses variations. Une équipe de chercheurs de l’Université de Princeton a ainsi testé les variations du génome connues pour être fréquentes chez les personnes autistes et a pu identifier comment elles modifiaient la combinaison de gènes exprimés dans les cellules du cerveau.

La même méthodologie a été appliquée à d’autres maladies parmi lesquelles la maladie de Crohn ou l’infection chronique à l’hépatite B. Dans les prochaines années, la médecine personnalisée devrait pouvoir utiliser cette méthodologie pour adapter un traitement en fonction de données génomiques recueillies pour chaque individu.

Julien Mozziconacci, Professeur en biologie computationelle, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) et Etienne Routhier, Doctorant en data science, Sorbonne Université

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

Préparer ma rentrée 2023-2024

Retrouvez toutes les étapes pour bien préparer votre rentrée, du dépôt de vos candidatures jusqu'au début de votre année universitaire.

Préparer ma rentrée slider

Candidater en première année de licence sur Parcoursup

Les candidatures en licence s'effectuent sur la plateforme nationale en ligne Parcoursup. Retrouvez le calendrier ainsi que nos fiches conseil pour vous accompagner lors des différentes étapes de la procédure.

Candidater en première année de master

Les candidatures en master s'effectuent à partir de cette année sur la plateforme nationale en ligne Mon Master. Retrouvez toutes les étapes à suivre pour effectuer vos recherches et candidater aux formations qui vous intéressent.

candidater première année de master


Quand nous nous sommes réveillés

Par Luba Jurgenson

Nuit du 24 février 2022 : invasion de l'Ukraine

La ville des enfants

Par Sophie Corbillé

Fantasmagorie du capital dans un parc d'attractions globalisé

Graduate

25 000

Étudiantes et étudiants

193

Parcours de licence

192

Parcours de master

13

Sites et campus

Formations

Découvrez toute notre offre de formation

Médecine

La faculté de Médecine assure l’enseignement des 3 cycles d’études médicales : de la PASS (intégrée à la faculté) au 3e cycle incluant des DES, DESC, DU et DIU. Les enseignements sont dispensés principalement sur deux sites : Pitié-Salpêtrière et Saint-Antoine. La faculté dispense également des enseignements paramédicaux : l’orthophonie, la psychomotricité et l’orthoptie. Le site Saint-Antoine intègre une école de sage-femme.

Etudier à | la faculté de Médecine

La diversité des étudiants et de leurs parcours est l’une de nos richesses. Sorbonne Université s’engage pour la réussite de chacun de ses étudiants et leur propose une large offre de formations ainsi qu’un accompagnement adapté à leur profil et à leur projet.

La vie associative

La diversité des étudiants et de leurs parcours est l’une de nos richesses. Sorbonne Université s’engage pour la réussite de chacun de ses étudiants.

21 393

usagers

17 527

étudiants

715

hospitalo-universitaires

12

centres de recherche

Chiffres-clés


Découvrir les dernières parutions

Toutes les parutions

Dans les pas de Jonas

Par Serge Uzan

L’algorithme de Jonas

Dupuytren

Par /Sous la direction de Julie Cheminaud et de Claire Crignon

Ou le musée des maladies

Sexe et violences

Par Danièle Tritsch, Jean Mariani

Comment le cerveau peut tout changer

Les extraordinaires pouvoirs du ventre

Par Harry Sokol

Un fabuleux voyage à la découverte des pouvoirs de notre microbiote.

Le Grand Livre des pratiques psychomotrices

Par Anne Vachez-Gatecel, Aude Valentin-Lefranc

La Psychomotricité

Par Françoise Giromini-Mercier, Suzanne Robert-Ouvray, Cécile Pavot-Lemoine, Anne Vachez-Gatecel

Apologie de la discrétion

Par Lionel Naccache

Comment faire partie du monde ?

Le Grand Livre des pratiques psychomotrices

Par Anne Vachez-Gatecel, Aude Valentin-Lefranc

Fondements, domaines d'application, formation et recherche

Je marche donc je pense

Par Roger-Pol Droit et Yves Agid

La recherche en temps d'épidémie

Par Patrice Debré

Du sida au Covid, histoire de l'ANRS

Neurosciences cognitives

Par / Sous la direction de Mehdi Khamassi

La médecin

Par Karine Lacombe, Fiamma Luzzati

Une infectiologue au temps du corona

Le Cinéma intérieur

Par Lionel Naccache

Projection privée au cœur de la conscience

Des formations riches et exigeantes

La faculté accompagne plus de 20 000 étudiantes et étudiants vers le monde professionnel grâce à une très large offre de formations adossées à la recherche, disciplinaires et interdisciplinaires, afin de répondre à tous les défis, scientifiques, technologiques et sociétaux.

Son cycle d’intégration pluridisciplinaire et son dispositif majeure-mineure en licence, ses 80 parcours de masters, ses formations internationales, ses cursus en apprentissage et son offre de formation continue permettent de proposer des parcours riches et exigeants, adaptés aux projets de chacun, nourris par les recherches de ses enseignantes-chercheuses, enseignants-chercheurs, chercheurs et chercheuses.

Recherche

Couvrant tous les champs de la connaissance en sciences et ingénierie, la Faculté des Sciences et Ingénierie soutient la recherche au cœur des disciplines, la recherche aux interfaces, le développement de partenariat avec les entreprises, et favorise l'émergence de nouvelles thématiques pour répondre aux grands enjeux  du XXIe siècle.

La vie à | la Faculté des Sciences et Ingénierie

Que ce soit sur le campus Pierre et Marie Curie, ou dans ses trois stations biologiques, à Banyuls, Roscoff et Villefranche, la Faculté des Sciences et Ingénierie constitue à la fois un lieu d'enseignement, de recherche et d'épanouissement intellectuel, où cours, conférences, colloques, congrès, expositions et autres manifestations scientifiques rythment la vie de ses étudiants et de ses personnels.

La vie associative à la faculté des Sciences et Ingénierie

Vie associative

Découvrez la vie associative de la Faculté des Sciences et Ingénierie.



Les mondes de Saturne

Par Sébastien Charnoz, Sandrine Vinatier, Sandrine Guerlet, Alice Le Gall

Les mystères de Saturne révélés !

Du Laboratoire Arago à l'Observatoire océanologique de Banyuls

Par / Sous la direction de Guy Jacques et de Yves Desdevises

Une épopée humaine et scientifique

Stem Cell Biology and Regenerative Medicine

Par Charles Durand & Pierre Charbord

River Publishers Series in Biotechnology and Medical Technology Forum